BJN#136 – L’exostosine, un nouvel antigène cible dans les GEM ?
Exostosin 1/Exostosin 2-Associated Membranous Nephropathy
Merci à Yosu Luque, Néphrologue à Paris et membre du Comité Scientifique du CJN, pour cette synthèse bibliographique. Vous aussi, n’hésitez pas à nous envoyer vos lectures !
Introduction
Dans les glomérulonéphrites extra-membraneuses (GEM) primitives deux antigènes cible, PLA2R et THSD7A, ont récemment été mis en évidence et concernent 70 à 80% de ces cas. Cependant, dans certaines GEM primitives et dans les GEM secondaires les antigènes cibles restent à déterminer.
Cette étude met en évidence un nouvel antigène cible, l’exostosine, une glycosyltransférase, grâce à la microdissection glomérulaire et la spectrométrie de masse sur des biopsies de GEM PLA2R négatives.
Patients/matériels et méthodes
Deux cohortes (une USA et une française) ont été étudiées par le laboratoire de pathologie rénale de la Mayo Clinic (cas reçus entre 2015 et 2018). Une première cohorte de 224 biopsies de GEM anti-PLA2R négatives et 102 contrôles dont des GEM PLA2R positives. La cohorte de validation comportait 48 cas de GEM PLA2R négatives et des GEM lupiques. Les techniques utilisées pour mettre en évidence le nouvel antigène sont la microdissection glomérulaire à partir de biopsies fixées et la spectrométrie de masse. Ces techniques sont confirmées par la détection de l’exostosine par immunohistochimie.
Résultats
L’exostosine 1 et 2 a été détectée par spectrométrie de masse dans 21 cas de GEM PLA2R négatives et dans aucun cas de GEM PLA2R positive ou des contrôles. La présence d’exostosine dans le versant externe de la membrane basale glomérulaire était confirmée par immunohistochimie dans ces cas. Dans 80% des cas exostosine positifs il existait des marqueurs d’auto-immunité sériques ou histologiques chez les patients, qui étaient majoritairement des femmes. La cohorte de validation a permis de voir que dans 8 cas sur 18 de GEM lupique il existait un marquage exostosine positif ainsi que dans 3 cas sur 16 de GEM primitive avec signes sériques d’auto-immunité. De façon intéressante un seul cas de GEM lupique associée à une classe III/IV était positif pour l’exostosine. Cependant dans les sérums des patients exostosine positif on n’a pas mis en évidence d’anticorps anti-exostosine.
Conclusion
Des GEM peuvent s’associer à des dépôts extramembraneux d’exostosine 1 et 2 et ce le plus souvent dans un contexte d’auto-immunité. Des anticorps anti-exostosine sériques n’ont pas pu être mis en évidence.
Les plus du papier
- La mise en évidence d’un nouvel antigène cible dans les GEM, pathologie auto-immune mais sans antigène cible détecté dans certains cas (GEM secondaires et 30% de GEM primitives)
- L’absence d’overlap entre les cas PLA2R positifs et exostosine positifs qui suggèrent deux sous-groupes de GEM
- La technique de microdissection glomérulaire et la spectrométrie de masse, un outil très puissant afin d’identifier des dépôts protéiques dans les maladies glomérulaires à dépôts
- L’association avec l’auto-immunité qui peut représenter un sous-groupe avec une évolution et un pronostic différents (risque d’évolution vers un lupus actif en particulier)
Les critiques
- L’absence de détection d’un anticorps spécifique sérique, à différence des cas PLA2R positifs, ne permet pas de tracer le mécanisme physiopathologique exact et écarte une technique de détection non invasive
- Il sera intéressant de valider à l’aide d’autres cohortes le phénotype et pronostic de ces cas exostosine positifs par rapport aux autres cas de GEM