BJN#264 – Les patients diabétiques ont désormais le FLOW !
Merci à @valentinmaisons, de Tours, membre du conseil scientifique pour ce résumé.
N’hésitez pas, si vous le souhaitez, à nous envoyer vos lectures !
Cette BJN est rédigée en rapport avec cet article :
Effects of Semaglutide on Chronic Kidney Disease in Patients with Type 2 Diabetes,
Vlado Perkovic et al., publiée dans le New England Journal of Medicine, 2024
Introduction
Le diabète de type 2 est l’une des principales causes de maladie rénale chronique dans le monde. Une nouvelle ère a commencé ces dernières années avec les inhibiteurs de SGLT2 et la finerenone en termes de protection cardio-rénale. D’autres molécules de l’arsenal thérapeutique ont un intérêt potentiel chez ces patients comme les antidiabétiques de type agonistes du GLP1.
Les auteurs de l’étude FLOW ont donc décidé d’évaluer l’effet du Sémaglutide, molécule injectable en sous-cutané, sur des critères de jugement néphrologiques.
Matériels et méthodes
Il s’agit d’une étude internationale multicentrique (387 centres dans 28 pays), en double aveugle, randomisée 1 :1 contre placebo, conduite entre 2019 et 2021 et financée par le laboratoire pharmaceutique Novo Nordisk. Il existait une stratification selon la prise ou non d’inhibiteur du SGLT2. La dose de sémaglutide était escaladée sur 8 semaines.
Les patients inclus étaient des diabétiques de type 2 non déséquilibrés (HbA1C < 10%), avec une maladie rénale chronique, recevant déjà une dose maximale de bloqueur du SRA ou n’en recevant pas pour cause d’effets secondaire.
Le critère de jugement principal était composite de type « MAKE » (Major Adverse Kidney Events) comprenant : initiation d’hémodialyse chronique, transplantation rénale, réduction du DFG (Débit de Filtration Glomérulaire) d’au moins 15mL/mn/1,73m2 ou d’au moins 50% sur plus de 28 jours ou un décès de cause néphrologique ou cardiovasculaire. Il y avait des critères de jugement secondaires de type pente du DFG, MACE (Major Adverse Cardiovascular Events), et mortalité toutes causes. Les analyses ont été réalisées en intention de traiter.
Résultats
Parmi les 3533 participants randomisés (1767 dans le groupe et 1766 dans le groupe placebo), le suivi médian était de 3,4 ans, sachant que l’essai a été arrêté prématurément suite à une analyse intermédiaire pré-spécifiée. L’âge moyen des patients était de 66 ans, 30 % étaient des femmes, étaient majoritairement issues des communautés caucasiennes ou latines et avaient un DFG à 47 mL/mn/1,73 m². Les caractéristiques initiales étaient bien équilibrées entre les 2 groupes.
Il y avait 24 % de risque de moins de réaliser le critère de jugement principal dans le groupe semaglutide par rapport au groupe placebo (HR, 0,76 [0,66-0,88] ; P=0,0003).
Ces résultats restaient assez similaires lorsqu’on séparait critères rénaux et cardiovasculaires du critère de jugement principal.
Les résultats des critères de jugements secondaires favorisaient le semaglutide.
La pente annuelle moyenne du DFG était moins abrupte (indiquant une diminution plus lente) de 1,16 mL/mn/1,73 m² dans le groupe semaglutide (P<0,001), le risque d’évènements cardiovasculaires majeurs était inférieur de 18 % (HR 0,82 [0,68-0,98]), et le risque de décès de toute cause était inférieur de 20 % (HR 0,80 [0,67-0,95). Sur le plan métabolique, à la semaine 104 la réduction moyenne du poids corporel était de 4,10 kg (IC à 95 %, 3,65 à 4,56) dans le groupe semaglutide par rapport au groupe placebo.
Il y avait moins d’événements indésirables graves dans le groupe semaglutide par rapport au groupe placebo (49,6 % vs 53,8 %).
Conclusion
Serait-ce l’arrivée du « d’Artagnan » du syndrome cardiorénal du diabétique en sus des 3 premiers mousquetaires (inhibiteurs du SRA, inhibiteurs de SGLT2 et antagonistes non stéroïdiens du récepteur minéralocorticoïde) ? Nouvel atout dans la panoplie pour la lutte contre le consortium cardio-réno-métabolique, le Sémaglutide a montré des résultats intéressants dans ce domaine. Victime de son succès, ce médicament a vécu une rupture de stock importante en France lié à ses résultats impressionnants et à l’effet « perte de poids ». A l’instar des iSGLT2 on s’attend à avoir de nouvelles études pour confirmer ces données lors d’utilisations de routines ou lors d’explorations dans d’autres populations.
Les plus de l’article
- Essai randomisé majeur avec des milliers de patients inclus dont les résultats sont probants.
- Il n’y avait pas de problèmes liés à un déséquilibre de randomisation.
- Ce médicament a le mérite de répondre à de multiples problématiques de santé publique (cardiologique, diabétologique, néphrologique, perte de poids…).
Les critiques
- Patients très sélectionnés, comme souvent dans ces grands essais internationaux.
- Population caucasienne sur-représentée (à contrario de la population afro-américaine, <5% des patients).
- Essai réalisé avant la prescription large d’inhibiteurs de SGLT2 et de finérénone, limitant les conclusions sur l’effets de la multi-thérapie. De nouvelles études vont être nécessaires pour répondre à cette question, certains sont d’ailleurs en cours.