BJN#94 – Metformine, un nouvel effet thérapeutique ?
Metformin prevents the development of severe chronic kidney disease and its associated mineral and bone disorder
Merci à Amandine Cros, Néphrologue à Reims (bientôt) et volontaire pour la BJN, pour cette synthèse bibliographique. Vous aussi, n’hésitez pas à nous envoyer vos lectures !
Introduction
L’insuffisance rénale chronique (IRC) entraine des perturbations du métabolisme phosphocalcique à l’origine d’une ostéodystrophie rénale et de calcifications vasculaires. Cette entité est appelée « Chronic Kidney Disease Mineral and Bone Disorder » (CKD-MBD). L’objectif de cette étude est de déterminer sur un modèle expérimental animal d’IRC sévère si la metformine a un effet protecteur sur l’homéostasie phosphocalcique et osseuse, ainsi que sur la formation des calcifications vasculaires.
Patients/matériels et méthodes
- 1/ Etude de l’impact de la metformine sur le métabolisme phosphocalcique et osseux et sur les calcifications vasculaires dans le contexte de l’IRC induite par un régime riche en adénine.
28 rats étaient soumis à un régime riche en adénine pendant 8 semaines puis randomisés. 14 ont reçu un placebo (carboxymethylcellulose) et 14 ont reçu 200mg/kg de metformine soit un ratio metformine/ration alimentaire égal à 65mg/20g par jour ce qui équivaut chez l’homme à un ratio à 3250mg/1000g et qui est comparable à la posologie quotidienne de metformine (habituellement entre 1500-3000mg/jour)
Critères de jugement :
- analyses biochimiques (créatininémie, calcémie, phosphorémie, PTH, FGF-23, hémoglobine, pH et bicarbonates)
- analyse histologique de biopsies rénales (dépôts rénaux de 2,8 dihydroxyadénine, fibrose et inflammation (cytokines, IL…))
- étude des calcifications vasculaires sur biopsies aortiques, carotidiennes et fémorales
- enfin analyse des paramètres du remodelage osseux sur biopsies osseuses.
- 2/ Etude de l’impact de la metformine (indépendamment de l’effet néphroprotecteur) sur les calcifications vasculaires induites par un traitement par warfarine.
28 rats étaient soumis à un régime riche en warfarine pendant 10 semaines puis randomisés. 14 ont reçu un placebo et 14 ont reçu 200mg/kg de metformine par jour.
Critères de jugement :
- analyses biochimiques (créatininémie, calcium, phosphore, pH et bicarbonates)
- étude des calcifications vasculaires sur biopsies aortiques, carotidiennes et fémorales.
Résultats
- 1/ Modèle d’IRC induite par un régime riche en adénine
Les rats du groupe contrôle développent : 1°/ une IRC plus sévère (DFG plus altéré, plus de fibrose, d’infiltration cellulaire et d’inflammation sur PBR) que les rats du groupe traités par metformine.
2°/ une hypocalcémie et une hyperphosphorémie conduisant à une hyperparathyroidie secondaire, contrairement aux rats du groupe metformine qui conservent une calcémie ionisée normale et ont des perturbations moins importantes du phosphore, de la PTH et du FGF -23.
3°/ Cela entraine des perturbations du métabolisme osseux avec notamment un remodelage osseux plus intense et à des calcifications vasculaires significativement plus importantes (au niveau fémoral) chez les rats du groupe contrôle par rapport aux rats traités chez qui les calcifications vasculaires sont comparables aux rats ayant une fonction rénale normale.
A noter pas d’acidose lactique dans le groupe de rats traités par metfomine.
- 2/ Modèle de calcifications vasculaires induites par un traitement par warfarine
L’exposition à la warfarine entraine l’apparition d’une IRC dans les deux groupes sans différence significative entre les 2 groupes (contrôle et metformine) concernant le niveau d’IRC, la phosphorémie, l’équilibre acido-basique. Pas de différence entre les groupes par rapport aux calcifications cardio-vasculaires.
Conclusion
Sur ce modèle animal, la metformine a un effet néphroprotecteur en diminuant la sévérité de l’IRC et ainsi les perturbations de l’homéostasie ostéo phosphocalcique et les calcifications vasculaires fémorales. Cependant elle n’a pas un effet direct sur les désordres phosphocalciques et l’amélioration des calcifications vasculaires.
Les plus du papier
- Etude sous un nouvel angle d’un traitement antidiabétique connu avec possible extension à la pratique clinique.
- Pose la question du rapport bénéfice/risque de l’utilisation de la metformine en cas d’IRC sévère.
Les critiques
- Faible effectif ne permettant pas de mettre en évidence des différences significatives concernant plusieurs sites de calcifications vasculaires malgré une certaine tendance.
- Pas de standardisation dans l’estimation des calcifications vasculaires.
- Pas d’effet indépendant de la metformine sur la réduction des complications de la CKD -MBD.