BJN#103 – Plus d’AVC ou pas ? : Telle est la question…
Incident atrial fibrillation and the risk of stroke in adults with chronic kidney disease. The Stockholm CREAtinine Mesurement (SCREAM) project
Merci à Julie Morinière Beaume, Néphrologue à Toulon et secrétaire du CJN, pour cette synthèse bibliographique. Vous aussi, n’hésitez pas à nous envoyer vos lectures !
Introduction
La survenue de fibrillation auriculaire (ACFA) est plus fréquente chez les patients insuffisants rénaux chroniques (IRC). ACFA et IRC représentent chacun séparément un facteur de risque d’accident vasculaire cérébral (AVC). Il semble que l’ACFA soit associée à un sur risque de mortalité chez les patients en hémodialyse mais il n’est pas prouvé l’association avec un risque augmenté d’AVC. Le but de cette étude est d’estimer le risque de mortalité et d’AVC conféré par la survenue d’ACFA chez les patients IRC stade III-IV non dialysés.
Patients/matériels et méthodes
Il s’agit d’une étude de cohorte. Les patients inclus (n= 116 184) sont issus de la cohorte SCREAM qui couvre 98% des patients présentant une maladie cardiovasculaire de la région de Stockholm et ayant eu au moins un dosage de créatinine plasmatique entre 2006 et 2011. Les critères d’inclusion sont : âge >18ans, DFG<60ml/min/1.73m² en CKD-EPI, aucun précédent d’ACFA.
Le critère d’évaluation principal est la survenue d’AVC ou la mortalité toute causes. Les critères d’évaluation secondaires distinguent AVC ischémique et hémorragique. La durée du suivi est celle jusqu’à la survenue du premier événement ou la fin de la période d’étude.
Résultats
Durant le suivi, 12% des patients ont développé une ACFA avec une fréquence inversement proportionnelle au niveau de DFG (respectivement 29.4, 40.8 et 46.3/1000pers-années pour un DFG entre 45-60, 30-45 et <30ml/min/1.73m²).
Un peu plus de 8000 patients (table 2) ont développé un AVC majoritairement ischémique. La survenue d’AVC est plus fréquente chez les patients ayant présenté un épisode d’ACFA que chez les autres (53.8 versus 16.6/1000pers-années). La survenue d’un décès est plus fréquente chez les patients ayant présenté un épisode d’ACFA que chez les autres (205.1 versus 67.5/1000pers-années). Après ajustement, la survenue d’une ACFA est associée à 2 fois plus de risque d’AVC dans cette population (HR, IC 1.88-2.14) et à un sur risque de mortalité 1.76 plus important (HR, IC 1.71-1.82). Ces résultats sont similaires quel que soit le stade d’IRC et la nature ischémique ou hémorragique de l’AVC.
Conclusion
Dans cette étude longitudinale, la survenue d’une ACFA est associée à un risque plus élevé de mortalité et d’AVC dans une population de patients IRC de stade III à IV en prenant en compte que l’existence d’une IRC est un facteur de risque d’AVC en elle-même. Plusieurs essais ont montré l’intérêt d’une stratégie préventive anticoagulante chez des patients avec IRC modérée mais ces données sont inconnues chez des patients avec IRC sévère notamment en prenant en compte un risque hémorragique non négligeable chez ces patients souvent âgés et comorbides.
Les plus du papier
- Un échantillonnage large et représentatif de la population
- La prise en compte statistique du risque compétitif de décès
Les critiques
- La faible proportion de patients avec IRC de stade IV et ainsi un faible nombre d’événements rendant difficile la mise en évidence d’une différence significative
- Le manque de données cliniques d’intérêt telles que l’IMC ou la mesure de la PA
- La définition des variables d’intérêt avec une seule mesure de créatinine et le diagnostic d’ACFA basé sur des codes administratifs