BJN # 37 A lire à quelques jours du marathon de Paris : Insuffisance rénale aiguë et pratique du marathon
Kidney Injury and Repair Biomarkers in Marathon Runners.
La pratique des sports d’endurance et plus particulièrement du marathon peut induire des insuffisances rénales aiguës. La fréquence de cette complication est inconnue et les mécanismes ne sont pas bien compris. 3 hypothèses sont évoquées : hypovolémie par déshydratation, ischémie rénale par hémo-détournement ou choc thermique par élévation de la température centrale.
Pour tester ces hypothèses, des participants au marathon de Hartford en 2015 et pratiquant régulièrement de la course à pied sur de longues distances ont été inclus. Un recueil sanguin et urinaire ainsi qu’une mesure des constantes physiologiques ont été réalisés 24h avant le marathon, dans les 30 minutes suivant l’épreuve et 24h après. Un dosage de la créatinine et des CPK a été complété par un dosage de biomarqueurs sanguins et urinaires d’insuffisance rénale aiguë et par une analyse microscopique urinaire.
22 coureurs (et pas des malades, quoique…), 9 hommes et 13 femmes (pas très représentatif du sex ratio habituel), âgés en moyenne de 44 ans, ont été inclus. Tous ont terminé l’épreuve en 4h en moyenne. La température extérieure était de 12,4°C. Toutes les créatininémies ont augmenté juste après l’épreuve. Pour 18 coureurs il s’agissait d’un stade 1 d’IRA (créatininémie X1.5 à X 2 ou augmentation de plus de 0.3mg/dl) et pour 1 coureur d’un stade 2 (créatininémie X 2 à X 3) selon les critères AKIN. Les CPK étaient augmentées après le marathon et plus encore après 24h. La fraction d’excrétion du sodium a chuté après le marathon.
Le sédiment urinaire est devenu actif juste après le marathon et l’est resté à après 24h.
Les biomarqueurs sanguins n’ont pas changé sauf YKL-1 (marqueur de réparation) et IL-8 (marqueur lésionnel) et n’étaient pas corrélés avec les CPK. Dans les urines, les marqueurs lésionnels et de réparation ont tous augmenté avec un pic en période immédiate post-marathon.
Malgré un faible nombre de sujets observés, cette étude met en évidence la grande fréquence de l’IRA chez les marathoniens (82%). L’absence de corrélation entre les biomarqueurs et l’élévation des CPK va à l’encontre de la responsabilité de la rhabdomyolyse. La diminution de la FENa semble confirmer l’existence d’une déshydratation et d’une hypoperfusion rénale. L’hypothèse du choc thermique est difficile à valider surtout dans des conditions de course plutôt fraiches. L’activité du sédiment urinaire montre tout même que les lésions tubulaires sont l’élément central de cette atteinte rénale sans pouvoir faire la part entre des lésions rénales périphériques d’une défaillance systémique ou secodnaires d’une hypotperfusion rénale. Les conséquences de la pratique du marathon au long cours de la pratique du marathon restent aussi à déterminer.
Merci à Thibault Dolley-Hitze (Néphrologue à l’AUB Santé à Saint-Malo, Comité Scientifique du CJN) pour cette synthèse bibliographique. Vous aussi, n’hésitez pas à nous envoyer vos lectures !