BJN#111 – Lanreotide indiqué dans le traitement de la PKRAD ?
Effect of Lanreotide on Kidney Function in Patients With Autosomal Dominant Polycystic Kidney Disease
Merci à Flora Brunner, Néphrologue à Marseille et membre du conseil scientifique du CJN, pour cette synthèse bibliographique. Vous aussi, n’hésitez pas à nous envoyer vos lectures !
Introduction
La polykystose rénale autosomique dominante (PKRAD) a une prévalence estimée de 3 à 4 pour 10 000 personnes. Sur le plan physiopathologique, l’adénosine monophosphate cyclique (AMPc) est augmentée dans les cellules tubulaires rénales des reins polykystiques. Ce messager promeut la croissance des cellules et la sécrétion de fluides, 2 mécanismes qui favorisent le développement et la croissance des kystes.
La somatostatine est un peptide sécrété entre autres par les cellules pancréatiques lorsqu’elle se lie à son récepteur, le couple inhibe l’enzyme adényl cyclase qui produit l’AMPc au niveau tubulaire rénal.
Certains essais cliniques de petite taille non contrôlés avec une durée de suivi limitée ont suggéré que les analogues de la somatostatine pouvaient ralentir la croissance des kystes.
Cette étude a pour objectif d’évaluer l’effet rénoprotecteur et la tolérance du lanréotide dans la PKRAD à un stade avancé.
Patients/matériels et méthodes
Il s’agit d’une étude prospective randomisée en ouvert incluant entre 2012 et 2015 des patients porteurs d’une PKRAD selon les critères modifiés de Ravine avec un DFG entre 30 et 60 ml/min/1.73m2, âgés de 18 à 60 ans, dans 4 cliniques néphrologiques aux Pays-Bas. Les critères d’exclusion étaient la bradycardie, un antécédent de lithiase vésiculaire, de pancréatite, de diabète, la prise d’AINS, lithium ou tolvaptan.
Les patients étaient randomisés pour recevoir soit le lanréotide 120mg en sous-cutané toutes les 4 semaines et le traitement standard, soit le traitement standard uniquement (objectif tensionnel < 140/90 mmHg avec régime hyposodé et bloqueurs du SRAA).
Devant la présence de 8 cas d’infections de kyste hépatique chez 7 patients, un amendement du protocole a été proposé : les patients ayant des antécédents ou ayant présenté pendant l’étude une infection de kyste hépatique ont été retirés de celle-ci.
Le critère de jugement principal était la pente de variation annuelle du DFG mesuré sur un suivi de 2,5 ans. Les critères de jugement secondaires portaient sur la variation du DFG avant et après traitement, l’incidence de l’aggravation de la fonction rénale (début du traitement de suppléance ou diminution de 30% du DFG), variation du volume total rénal et de la qualité de vie.
Résultats
Parmi les 309 patients randomisés, l’âge moyen était de 48,4 (± 7,4) ans, on notait 54% de femmes, 80% des patients étaient sous bloqueurs du SRAA. Il n’y avait pas de différence entre les 2 groupes sur le critère de jugement principal (cf figure), la pente de déclin du DFG était de – 3,53 ml/min/1,73m2 dans le groupe lanreotide versus – 3,46 ml/min/1,73m2 dans le groupe standard (différence entre les 2 groupes, −0.08; [95% CI, −0.71 ; 0.56]; p = 0.81).
Concernant les critères secondaires, il n’y avait pas de différence entre les 2 groupes concernant le critère aggravation de la fonction rénale (HR, 0.87 [95% CI, 0.49; 1.52]; p = 0.87) ni en terme de variation de DFG mesuré avant et après traitement (−3.58 vs −3.45; différence, −0.13mL/min/1.73 m2 annuelle [95% CI, −1.76 ; 1.50]; P = 0.88), ni en terme de qualité de vie.
L’augmentation du volume rénal était moindre dans le groupe lanreotide (4.15% vs 5.56%; différence, −1.33% annuelle [95% CI, −2.41% ; −0.24%]; p = 0.02).
Concernant la tolérance du traitement, on notait 55 épisodes d’effets indésirables dans le groupe lanreotide versus 29 dans le groupe traitement standard, il s’agissait principalement de réactions au niveau du site d’injection (32% vs 0.7%), de diarrhées (91% vs 6.6%) et de manière notable d’infections de kystes hépatiques (5.2% vs 0%).
Conclusion :
Le traitement par lanréotide n’a pas montré de différence par rapport au traitement standard en terme de ralentissement du déclin de la fonction rénale chez des patients polykystiques avec un DFGm entre 30 et 60 ml/min/1.73m2 sur un suivi de 2,5 ans.
Les critiques du papier :
On notait un nombre important de patients randomisés, il s’agissait d’une étude en ouvert mais les critères de jugements étaient basés sur des mesures objectives pour limiter les biais. Les patients étaient inclus à un stade déjà relativement avancé (trop pour montrer un effet du traitement ?)