BJN#217 – Pousser les Glifozines encore plus loin dans la MRC
Après une petite période de pause, et en post réunion annuelle nantaise, voici le retour des BJN!
Merci à @Valentin Maisons, de Tours, pour ce résumé. N’hésitez pas, si vous le souhaitez, à nous envoyer vos lectures!
Cette BJN est rédigée en rapport avec cet article:
Effects of Dapagliflozin in Stage 4 Chronic Kidney Disease, Chertow G et al, J Am Soc Nephrol 2021.
Introduction
Les glifozines, inhibiteurs du SGLT2, ne cessent de faire parler d’elles, notamment par leurs outcomes endocrinologiques, cardiologiques et néphrologiques.
Dans l’essai contrôlé randomisé DAPA-CKD (Dapagliflozin and Prevention of Adverse Outcomes in Chronic Kidney Disease) publié en 2020 dans le NEJM, la Dapagliflozine permettait de réduire de manière significative le risque d’insuffisance rénale et prolongeait la survie des patients atteints d’IRC avec ou sans diabète de type 2.
L’étude rassemblait 4304 patients avec un DFGe entre 25 et 75mL/mn/1,73m2 et une albuminurie entre 200-5000mg/g. Reste à savoir ses effets lorsque l’on s’intéresse plus particulièrement aux patients avec une fonction rénale < 30mL/mn/1,73m2
Patients/matériels et méthodes
Analyse de sous-groupe des patients de stade 4 de la MRC de DAPA-CKD. Pour rappel dans l’essai les patients étaient traités avec une dose stable d’inhibiteur du SRAA pendant 4 semaines sauf contre-indication médical. Randomisation ensuite en bloc, 1:1, stratifié selon le statut diabétique et de l’albuminurie (< ou > 1000 mg/g). Les analyses statistiques étaient réalisées en intention de traiter.
Le critère d’évaluation principal était un composite comprenant : le temps jusqu’à un déclin persistant de ≥50% du DFGe, l’IRCT, ou le décès d’origine néphrologique/cardiovasculaire. Les critères d’évaluation secondaires étaient un composite rénal (identique au critère d’évaluation principal mais sans décès cardiovasculaire), un composite de décès cardiovasculaire ou d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque, et le décès toutes causes confondues.
Résultats
– 293 participants atteints d’IRC de stade 4 avaient reçu la dapagliflozine et 331 le placebo.
– Réduction de risque : 27 % ([IC 95 %] : -2 à 47 %) pour la dapagliflozine concernant le critère de jugement principal. Pas de différences significatives versus placebo mais l’essai initial n’était pas conçu pour répondre à cette question. Idem pour les critères de jugement secondaire.
– Lorsque l’on comparait les effets chez les stades 4 et ceux chez les stades 2-3, il n’y avait pas de différences significatives (valeurs du p d’interaction pour l’affectation du traitement en fonction du stade de l’IRC, respectivement le critère primaire et les 3 critères secondaires : 0,22 ; 0,13 ; 0,63 et 0,95 ).
– La pente du DFGe a diminué respectivement de 2,15 et 3,38 ml/mn/1,73m2 par an dans les groupes dapagliflozine et placebo (P=0,005).
– A noter que l’incidence des EI notamment rénaux étaient plus importants chez les stades 4 (placebo & dapa) que chez les stades 2-3. Néanmoins pas de différences significatives entre les groupes placebo et dapagliflozine tant pour les EI graves que pour les non graves.
Conclusion
Chez les patients atteints insuffisants rénaux chroniques entre 25 et 30mL/mn de DFG à baseline avec albuminurie significative, les effets de la dapagliflozine étaient cohérents avec ceux observés dans l’ensemble de l’essai DAPA-CKD, sans preuve d’une augmentation des risques d’EI.
On attend néanmoins une étude spécifique qui permettrait :
- Un recrutement large de stade 4 en deçà de 25mL/mn/1,73m2, voire des stade 5.
- Une puissance suffisante pour prouver une véritable supériorité sur les critères cités versus placebo.
- Éventuellement de conclure sur les effets secondaires avec un effectif plus conséquent.
Les plus du papier
- Priorité de santé publique…
- Essai de taille conséquente, randomisé, avec 386 centres dans 21 pays avec nombre conséquent de patients.
- Analyses post hoc pour notamment les interactions stades 2-3 et 4
- Sous-groupe d’intérêt qui n’a pour le moment pas l’AMM
Les critiques
- Les auteurs généralisent au stade IV… mais en réalité ce sont seulement les patients entre 25 et 30 de DFG. Ils se justifient avec le supplément dans lequel on peut voir qu’il y avait en réalité à baseline 31 patients en dessous de 25mL/mn dans le groupe placebo (dont 26 à 24-23mL/mn…) et 29 dans le groupe Dapa (dont 26 à 24-23mL/mn…) ce qui à mon humble avis ne change pas grand-chose !
- Les patients diabètiques de type 1, de polykystose rénale, de lupus néphrétique ou une vascularite à ANCA… étaient exclus ce qui limite l’interprétation.
- Faible taux de personnes de couleurs qui posent de grandes questions éthiques.
- Devant les effets spectaculaire essai stoppé à 75% du recrutement ce qui a diminué le nombre de stades 4.