BJN#113 – Greffé avec un donneur en IRA aux States ? Don’t worry, tu n’auras pas une moins bonne fonction du greffon !
Deceased-donor acute kidney injury is not associated with kidney allograft failure
Merci à Yosu Luque, Néphrologue à Paris et membre du conseil scientifique du CJN, pour cette synthèse bibliographique. Vous aussi, n’hésitez pas à nous envoyer vos lectures !
Introduction
L’insuffisance rénale aiguë (IRA) du donneur au prélèvement est un critère classiquement retenu comme de mauvais pronostic en transplantation rénale. Celle-ci est associée à un retard de reprise de fonction plus fréquent. Aux Etats-Unis, l’IRA du donneur double la probabilité de refus lors d’une proposition (30% des reins en IRA sont refusés). Alors que certaines études suggèrent que l’IRA du donneur n’est pas associée à une moins bonne survie du greffon à court terme, l’étude de Hall et al. vise à étudier la survie rénale à long terme des receveurs ayant été transplantés avec un donneur en IRA.
Patients/matériels et méthodes
Il s’agit d’une étude multicentrique rétrospective réalisée aux Etats-Unis à partir du registre national UNOS sur 1298 donneurs décédés ayant abouti à 2430 transplantations rénales. Une étude de survie est réalisée à partir de cette cohorte globale en séparant des groupes en fonction de leur degré d’IRA au prélèvement (critères AKIN 1, 2 ou 3). Un sous-groupe (n= 601 donneurs décédés, soit 30% de la cohorte globale) de cette cohorte a été étudié plus en détail (recueil de données supplémentaires) pour réaliser une étude de survie avec un critère composite incluant la fonction rénale.
Résultats
Sur les 1679 donneurs potentiels seuls 1298 ont abouti à une transplantation rénale (taux de refus de 21%). Dans la cohorte globale, 322 donneurs en IRA (ayant abouti à 585 greffes) ont été comparés à 976 donneurs sans IRA (ayant abouti à 1845 greffes). 211 donneurs en IRA étaient en stade 1, 62 en stade 2 et 49 en stade 3 de la classification AKIN. L’âge moyen des donneurs de cette cohorte est de 41 ans, il y a environ 20% de reins à critères élargis avec un KDPI moyen à 48%.
La perte du greffon à 6 ans n’est pas influencée par l’IRA du donneur (quel que soit le stade) dans cette cohorte et l’IRA n’est pas un critère indépendant associé à la survie du greffon (cf. Figure)
L’étude de sous-groupe (n=601) ne retrouve pas de différence non plus en étudiant un critère composite intégrant le DFG (<20 ml/min) et la perte du greffon.
Conclusion
Dans cette cohorte américaine, l’IRA du donneur n’est pas associée à la perte de greffon rénal à long terme. Les donneurs en IRA sont une source importante de greffes fonctionnelles.
Les plus du papier
- Cohorte de grande taille.
- La conclusion va à l’encontre des idées reçues sur l’IRA du donneur et peut permettre une meilleure utilisation des greffons proposés aux USA (où le taux de refus est très important)
- L’IRA est associée à l’IRC dans le rein natif mais cette association est probablement moins relevante chez un transplanté rénal où la survie globale du greffon n’est que de 10 ans.
Les critiques
- Etude rétrospective de registre
- Utilisation de critères AKIN (2007) et non KDIGO (2012) pour la définition d’IRA
- Le nombre d’IRA sévères (AKIN 3) est faible et la plupart des donneurs ont une IRA modérée.
- Biais de sélection : On ne regarde que les reins acceptés par les USA (taux de refus de 21%), on ne peut pas généraliser le message en disant que l’IRA du donneur n’est pas importante. Il s’agit ici de reins préalablement triés et acceptés. Dans ce sous-groupe de greffons acceptés en effet il n’y a pas d’impact de l’IRA du donneur.
On ne peut pas extrapoler la conclusion à nos donneurs qui sont pour la moitié à critères élargis en France.